Figures de L’artiste entrepreneur

,

Certains artistes sont devenus de véritables managers, d’authentiques chefs d’entreprise rompus aux techniques de la finance et de l’économie de marché, et informés des modèles de régulation/dérégulation de ce capitalisme tardif et cognitif avec laquelle ils savent désormais jouer et composer. On peut dire qu’ils ont acquis désormais une reconnaissance comme acteurs économiques et financiers autant que comme producteurs artistiques. Au cœur de l’économie financiarisée d’aujourd’hui, ils se posent, par delà le bien et le mal, comme les révélateurs des folies d’une époque qui remet en cause jusqu’au tabou de la mort, laquelle s’exhibe dans leurs œuvres sous la forme de nouvelles vanités glacées, et designées avec rigueur, comme dans les installations de Damien Hirst. Un Damien Hirst dont on conserve en mémoire la fracassante effraction qu’il fit sur la scène du commerce de l’art, en pleine crise financière mondiale. Comme le soutient Pierre Michel Menger, « les artistes  alimentent volontiers la légende dorée de la création subversive, anticonformiste, inspirée, rebelle aux conventions sociales et à l’utilitarisme marchand, mais force est de constater qu’ils évoluent quotidiennement dans les modèles économiques les plus conformes aux exigences du nouveau capitalisme – hyperflexibilité, autonomie, fonctionnement en équipes, etc.  Ce paradoxe trouvera peut-être sa solution dans l’idée qu’aujourd’hui l’artiste et le travailleur des temps post-industriels fusionneraient dans une seule et même figure, celle du « créatif ». Non seulement l’art ne serait plus l’autre du travail, mais il deviendrait son double inavoué, son prototype futuriste, et par là même un lecteur avancé des métamorphoses en cours du capitalisme ».

Lire la suite…