Constatant que l’homme ne considérait plus le monde
que comme l’occasion de son pouvoir, Francis Ponge
écrivait, en 1950, qu’il appartenait aux artistes de
prendre le monde en réparation dans leur atelier.
Tel était la formule princeps d’un premier livre,
La Réparation dans l’art, publié par Norbert Hillaire en
2019, qui lui avait permis de prendre la mesure de la
profondeur de temps qui habite ce mot.

La formule de Ponge demeure plus que jamais d’ac-
tualité, en un temps de mutations anthropologiques

et techniques qui engagent aussi le destin de l’art,
cette vieille chose qui n’en fi nit pas de rajeunir et de
se renouveller.
Dans cet abécédaire, Dina Germanos Besson et

Norbert Hillaire ont voulu, au miroir de la psychana-
lyse et à travers l’art, la littérature, la poésie, la philo-
sophie ou la ville, reprendre l’exploration de ce mot.

À l’image des 26 lettres de l’alphabet à partir des-
quelles peuvent se former à l’infi ni des mondes divers

dans l’espace poétique ou littéraire, ce livre offre,

à partir des 26 mots de la réparation qui le com-
posent, un éventail de chemins de traverse, condui-
sant le lecteur vers d’autres horizons qui se tiennent

en réserve de son énigme polysémique. Ce mot, aux

mille facettes, contient ainsi, dans certaines tradi-
tions, l’âme du monde dans sa réparation même.

C’est pourquoi aussi ce petit livre met en regard
deux points de vue : celui de la psychanalyste Dina
Germanos Besson, et celui de l’essayiste et théoricien
de l’art et des techniques Norbert Hillaire.
C’est l’ouverture du sens du mot réparation qu’ils
ont recherchée, à l’heure où son usage répété et
obsédant, dans l’air du temps et la doxa publicitaire,
fi nit par l’anesthésier dans une platitude glaçante.